Dexter Johnson, le complice
Né le 12 mars 1943 à Bathurst (actuel Banjul) en Gambie, Laba Badara Sosseh, en référence à son ethnie, les Socés (Sosso), peuple de l’ex royaume du Gabu, fait ses premiers pas en 1963 au sein de l’African Jazz Band de Bathurst avec Badou Diop (guitare, basse) et Pape Touré (voix), deux futurs membres fondateurs du groupe Super Eagles devenu Ifang Bondi. Trois ans plus tard, il est aux côtés du saxophoniste d’origine nigériane avec qui il partage la langue anglaise, Dexter Johnson (1932-1977), leader du Super Star de Dakar, l’orchestre qui animent alors les nuits chaudes du Moulin Rouge, un club branché du quartier de la Médina à Dakar, ou de la discothèque Sangomar.
Les deux complices sortiront chez Ndardisc, El sonero de Africa vol 1 et En direct du Sangomar, deux 45 tours de standards cubains chantés en espagnol et qui connaissent aussitôt le succès : « Guantanamera », « El manisero », « La sitiera » et « Que se funan », « Guantanamo »… Mais il faut attendre la parution de El sonero de Africa vol 2 (dont « El Manisero ») et surtout de « Seyni kay fonema » (« Seyni vient m’embrasser » en wolof), un morceau chanté en wolof, pour que Laba Sosseh connaisse une réelle notoriété dans toute l’Afrique de l’Ouest.
Après la sortie de Dexter Johnson & Laba Sosseh, un 45T chanté en wolof et en anglais et comprenant une reprise du célèbre « Seyni kay fonema », « Come My Love » (Viens mon amour), « Ayo néné » (une berceuse sénégambienne) et surtout « Aminata », une autre chanson d’amour qui deviendra son plus gros tube, le duo intègre en 1968 le Star Band de Dakar et fait chavirer le Miami Club d’Ibra Kassé, s’illustrant par un afro-cubain marqué par les lignes de sax percutantes de Dexter et la voix chaude et nasillarde mais remarquablement juste de Laba. Ils enregistreront plusieurs opus avec le Star Band, dont « Le Lolaye ».
Au sommet de leur art, ils décident de reprendre leur liberté et fondent leur propre orchestre, Super International Band, et s’installent en Côte d’Ivoire, animant les nuits chaudes des clubs de la capitale Abidjan. 1974 voit le duo enregistré El sonero de Africa vol 3 avec un remix du standard cubain, « Guantanamera », et un inédit, « Sénégal, An XIV », marqué par les sonorités du mbalax wolof et dédié au Sénégal qui fête cette année-là ses 14 ans d’indépendance.
La Voz Africana, Disque d’Or afro-cubain
En Côte d’Ivoire où il enregistre en 1977, année de la mort de son ami Dexter Johnson, Formidable Laba Sosseh pour Sacodis d’Aboudou Lassissi. De ce pays où ses chansons sont diffusées à longueur de journée sur les ondes, Laba Sosseh voit sa renommée s’étendre hors des frontières du continent. La consécration internationale viendra lors de ses rencontres avec les stars cubaines à New York, ville de naissance de la fameuse sauce latine, la « salsa« . Laba Sosseh y enregistre en 1980 pour Sacodis plusieurs disques dont Akoguin Theresa avec l’Orchestra Aragon au grand complet et 4 volumes de Salsa Africana : Monguito El Unico Presents Laba Sosseh in USA avec Monguito El Unico, Alfredito Valdes, Bomberito Zarzuela, Mario Rivera ou encore Pupi Legarretta. C’est un succès international immédiat : Laba Sosseh y démontre sa parfaite connaissance des merengue, pachanga, cha cha cha, mambo, rumba cubaine, guaguanco, son cubano, boléro, salsa… Vendu à plus de 100.000 exemplaires, Salsa Africana fait de Laba Sosseh l’un des premiers Disque d’Or continental pour un chanteur afro-cubain. Il est alors surnommé avec déférence « La Voz Africana » (La voix africaine) ou « El Maestro » (Le maestro) par les Cubains eux-mêmes, un signe de reconnaissance de la part de ses lointains cousins des Caraïbes. Son album éponyme, Laba Sosseh, produit en 1981 par le label Sar Productions de Roberto Torres, vient confirmer son statut de grande voix de la musique afro-cubaine.
Laba Sosseh et Africando
Après un break discographique de plusieurs années, Laba Sosseh est invité en 1998 à poser sa voix sur la chanson « Ayo Nene » de l’album Baloba d’Africando, la formation panafricaine initiée par Ibrahim Sylla (Syllart Productions), ressuscitant dans une version salsa son méga hit « Aminata ». Il signera son grand retour en 2001 avec la sortie chez Africa Production/Mélodie de la compilation El Maestro – 40 ans de salsa… comprenant une douzaine de titres.
La Voz Africana s’est tue
Auteur-compositeur et chanteur prolifique, Laba Sosseh disparaît le 20 septembre 2007 à Dakar, au Sénégal, après plus de 45 ans de salsa, laissant derrière lui un nombre impressionnant de hits.
[…] Samb, Aminata Fall, Diabou Seck, Doudou Sow, Fa Mbaye Issa Diop, Henri Guillabert, Laba Sosseh, Lalo Kéba Dramé, Laye Mboup, Maa Hawa Kouyaté, Moussa Ngom, Ndiaga Mbaye, Ndiouga […]