S .C. Pourquoi ce nom Matar Lébou Bi ?
MLB. J’ai choisi ce nom qui est celui de mon ethnie. En fait , je suis breton (rires), je me sens proche des bretons car nous partageons cette culture de la pêche. Nous les Lébous comme les Bretons sommes en lien étroit avec la mer. Je suis né sur la mer comme mon père et mon grand-père. La mer m’inspire C’est l’histoire de ma famille et des lébous. Je chante en lébou parce que la langue se perd. Je transmets cette histoire dans mes textes et, pour la porter, je choisis une musique acoustique. La culture lébou, c’est un patrimoine de résistance, une musique libre. Le peuple lébou n’a jamais eu de roi. C’était une démocratie traditionnelle où la parole était sacrée, où les gens réglaient les conflits pacifiquement. Jusqu’à aujourd’hui, quand un lébou parle, on sait qu’il dit la vérité. Le modèle lébou pourrait inspirer les sociétés actuelles.
S .C Pensez-vous que cela pourrait être un modèle pour le Sénégal ?
MLB. Ca ne sera jamais un modèle car ici, c’est l’argent qui domine tout. Si tu es un homme de parole, on t’isole, on t’ignore, la parole donnée est gâchée par la corruption.
S .C. Quand on est comme toi guitariste, chanteur, originaire de Dialaw, on porte une parole particulière, différente de celle de Dakar ?
MLB. A l’époque, tout le monde respectaient les résistants parce qu’ils étaient unis mais aujourd’hui, quand un mouvement se forme, s’organise, personne n’est d’accord. La moitié dit oui et l’autre dit non. Je n’ai pas confiance dans le mouvement actuel. Il faut rester debout. Si tu mets les gens à côté, c’est la fin du monde. On ne sait pas où on va.
S .C. La jeunesse aujourd’hui conteste les confréries. Qu’en penses-tu ?
MLB. Autrefois, on avait du respect pour les confréries. La jeunesse maintenant est aveugle et surtout ne fait plus confiance à personne . Si tu t’exprimes, que tu donnes un avis différent d’eux, ils pensent que tu as reçu de l’argent. Il y a un sentiment de désespoir dans la jeunesse. Le titre Aduna parle de cela, de la fin du monde.
S .C. Ta carrière a débuté en 1992.
MLB. Oui, j’avais alors 28 ans. J’avais créé un groupe de djembés à Yenne, je chantais dans les bars chaque samedi. Mon frère jouait de la guitare et j’ai eu envie de me mettre à l’instrument. En 1995, j’ai trouvé un maître, Yousssoufou Ndoye, qui m’a enseigné les accords et c’est comme ça que tout a commencé.
S .C. Tu as choisi le Folk lebou ?
MLB. Je me suis inspiré du répertoire lébou. Nous avons une tradition de chants dans notre communauté. Nous chansons dans les baptêmes et les mariages. Ma mère chante très bien. Les chants lébou. thione Seck.
S .C. Quand es-tu devenu professionnel ?
MLB. La professionnalisation est difficile au Sénégal. On a du mal à trouver des scènes. Ma première scène a été en 1998 avec Souleymane Faye, venu à Sobo Bade, Il a apprécié, m’a dit que ma voix était haute et très harmonieuse, .
S .C. Quelles ont été les scènes marquantes ?
MLB. L’hommage à Gérard Chenet à l’Engouement, avec des artistes comme Wally Gueye et beaucoup d’artistes de Toubab Dialaw. Un concert émouvant.
S .C. Quels sont tes thèmes de prédilection ?
MLB. Dans le titre « Djenne Ndiaye », je parle des vols d’enfants dont on ne parle pas assez et qui étaient nombreux voici quelques années. Les enfants étaient volés et tués, utilisés pour des sacrifices. Notamment pendant les périodes d’ élections. On a vu des cas terribles notamment à Rufisque. Je dénonce cela. Je parle aussi de la pollution. Je dénonce les gens qui jettent leurs ordures dans la mer, sur les routes, dans les champs. Même l’air que nous respirons est pollué à cause des voitures. Notre mentalité c’est « je peux faire ce que je veux ». Je travaille beaucoup avec les associations comme Diarama, l’APPV (association du Dialaw Festival). On a constitué des groupes sur Whatsapp avec les acteurs de l’environnement. On se donne rendez vous pour des opérations de Set Setal (nettoyage)
S.C. Quels sont les projets musicaux ?
MLB. J’ai un single et un clip sur YouTube dénonçant l’immigration clandestine . Avec un groupe de rappeurs de Dialaw, nous projetons de monter un festival de musique urbaine.
Retrouvez la biographie de l’artiste et sa musique.
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